Allemagne / Ukraine (V. Bar)

Et du coté des pays organisateurs, c’est comment ?

 

Aujourd’hui, c’est le match Allemagne – Ukraine qui va faire vibrer tous les spectateurs ! Enfin… Vibrer est un grand mot, puisque les pronostics sont assez univoques : l’Allemagne gagne une majorité de voix. Ce n’est pas vraiment étonnant, lorsqu’on sait qu’elle a déjà été trois fois la grande gagnante de l’Euro, contrairement à l’Ukraine… qui n’a jamais dépassé les phases de poule. Visiblement, l’Allemagne et l’Ukraine ne jouent dans la même division et pourtant, elles partagent tout de même une similarité

Rappelez-vous, à l’instar de la France, ces deux pays ont déjà été hôtes des Championnats d’Europe. En 1988 (et oui, ça ne nous rajeunit pas !), ce sont les stades d’Allemagne qui accueillaient les joueurs, tandis qu’en 2012, ce sont ceux de Pologne et d’Ukraine qui ouvraient leurs portes. Il serait tout à fait légitime de se demander quelles sont les conséquences économiques de cet engagement. Et pour pousser la réflexion un peu plus loin, on peut même se demander si les problématiques (et donc choix) d’organisation de ce genre d’événements en France, dans son état instable actuel, sont les mêmes que pour l’Allemagne, et la Pologne et l’Ukraine, il y a maintenant plusieurs années.

 

En réalité, peu d’informations sur les dépenses et choix réalisés par l’Allemagne sont disponibles et la seule chose que l’on retiendra de cette année-là sera l’écrasante victoire des Pays-Bas sur la Russie en finale.

 

Quelques années plus tard (et une victoire de la France), ce sont la Pologne et l’Ukraine qui deviennent hôtes du Championnat. Cette coorganisation, qui peut paraître étrange au premier abord, a pour objectif d’élargir les possibilités de pays hôtes. La Pologne sera largement favorisée puisque les investissements liés à l’Euro seront de 25 milliards d’euros, contre seulement 10 milliards pour l’Ukraine.

En fait, ces investissements ont permis à la Pologne de s’équiper de nombreuses installations (routes, chemins de fer, aéroports), ce qui semble être bénéfique à long terme. Pourtant, les emprunts contractés vont être énormes : le pays écope alors d’au moins 60 millions d’euros de dettes, uniquement pour les stades. Au final, environ 650 millions de touristes sont venus pour l’occasion : ils ont dépensé aux alentours de 250 millions d’euros, ce qui est finalement très peu en comparaison des investissements réalisés et au PIB de la Pologne (de 380 milliards d’euros).

L’Ukraine, elle, a eu plus de mal à trouver des investisseurs. En effet, sa situation politique [1] a poussé de nombreux dirigeants politiques de l’UE ainsi que de simples passionnés à boycotter les matchs qui y ont eu lieu (dont François Hollande, par exemple) et cela n’a pas vraiment plu aux sponsors et investisseurs. Au final, le financement du Championnat a été réalisé en grande partie par l’État ukrainien… Et là, en tant que bon français râleur, on aimerait plaindre les pauvres citoyens qui devront payer un tas d’impôts pour rembourser ces investissements. Pourtant, tout comme la Pologne, ce sont majoritairement des investissements à long terme qui ont été réalisés et qui sont donc bénéfiques. Et puis, l’Euro aura permis à l’Ukraine de se faire une image et de s’ouvrir aux tourismes, notamment grâce à la construction d’infrastructures touristiques… Au final, pas d’effets négatifs pour l’Ukraine, mais des effets positifs à nuancer tout de même.

Aujourd’hui, c’est la France qui accueille les différentes équipes qualifiées pour l’Euro. Le coût estimé pour cet événement n’est “que” d’environ 1,6 milliard d’euros soit tout de même plus de six fois moins que pour l’Ukraine. En fait, cela parait plutôt logique puisque la France est un pays développé, possédant déjà des stades aux normes, un bon nombre de transports, des logements pour les touristes et les sportifs…

Suite aux divers attentats [2] qu’a subit la France, il semble évident (et tout à fait logique) que la majorité des Français s’inquiètent et se questionnent quant à la sécurité de ces matchs, tout en les cautionnant [3]. Même si l’UEFA ne mentionne pas véritablement les coûts liés à la sécurité, le budget aurait tout de même augmenté de 15%.

Simulation d’attentat à Nîmes dans une fan-zone.

Pour assurer la sécurité du Championnat d’Europe 2016 et son bon déroulement, la France a réalisé de nombreux exercices de simulation d’attaques terroristes afin de se préparer aux pires éventualités. Un système de vidéo-surveillance est également mis en place au sein des fan-zones, qui doivent accueillir jusqu’à 100 000 supporters. Et puis évidemment, palpations à l’entrée, détecteurs d’objets métalliques… A l’origine, 12 millions d’euros, puis 17, étaient prévus pour la sécurisation des dix fan-zones françaises. Au final, ce sont 24 millions d’euros qui seront mobilisés. Apparemment, l’UEFA et la France sont prêts à tout pour sécuriser l’événement, et c’est tant mieux. Mais au final, qu’est-ce que cet Euro apportera réellement à la France ?

En réalité, il est encore trop tôt pour le dire. Cependant, la France semble souhaiter relancer son économie grâce à l’Euro. Par exemple, il permettra de relancer le tourisme, freiné par les récents attentats. Il permettra également la création de 20 000 emplois (dont 5 000 durables), réduisant le chômage durant cette période. Les économistes estiment les retombées économiques à 1,2 milliard d’euros. Enfin, quoi qu’il en soit, j’ai personnellement hâte de découvrir les réels effets de l’organisation du Championnat sur la France…

 

Pour conclure, le Championnat d’Europe semble avoir des effets à long terme sur les pays organisateurs même si les conséquences de l’organisation de cet événement restent nuancées par les crises, les enjeux politiques (Ukraine) et les enjeux sociaux (France). Il est également bon de constater que la sécurité des spectateurs reste une priorité, quel que soit le pays, malgré les coûts que cela peut générer. Et puis coté participants, il a été observé, par la banque ABN AMRO, que les pays gagnants de la Coupe du monde ou du Championnat d’Europe voyaient leur croissance augmenter de 0,7%… Ca donne envie de gagner, non ?

D’ailleurs, laissons nos interrogations et nos réflexions de coté, servons-nous une bonne pinte, et allons regarder ce match, qui sera, je l’espère, surprenant !

[1] Maintien de la pression sur Kiev pour libérer l’opposante ukrainienne Ioulia Timochenko, égérie de la Révolution Orange et ancienne Premier Ministre de l’Ukraine, condamnée pour abus de pouvoir.

[2] Attentat de Charlie Hebdo, et attentat du 13 Novembre, suivis également des attentats de Bruxelles en Belgique.

[3] Selon un sondage Odoxa, 79% des Français sont opposés à l’annulation de l’Euro 2016.