Irlande / Suède (A.Baudouin)

Où en sont les femmes dans le sport ?

À l’approche de la confrontation Irlande – Suède, on peut remettre la question du droit des femmes sur le tapis. À ce sujet, Ibrahimovic avait fait parler de lui. Sa critique sur les joueuses féminines de son pays natal n’était pas passée inaperçue avec la polémique du moment en Suède. En effet, lors d’une cérémonie organisée par la fédération suédoise, le meilleur joueur avait été récompensé par une voiture, alors que son homologue féminine est repartie les mains vides. Une décision critiquée par une partie de l’opinion publique. Ce qui n’a pas empêché le fier attaquant suédois de surenchérir en affirmant qu’il pouvait leur obtenir un vélo (récompense proportionnelle à leur revenu généré). Mais alors, qu’elle est la place des femmes dans le sport ? Qu’en est-il de l’inégalité hommes/femmes dans ce domaine ? Et notamment dans les sports non-mixtes ?

Tout d’abord, nous pouvons préciser qu’il n’existe qu’une petite quantité de sports réellement mixtes, c’est-à-dire où les femmes et les hommes concourent dans la même catégorie ou dans la même équipe. L’équitation est à ce jour le seul sport olympique mixte. D’ailleurs, depuis 1984, le titre olympique de dressage n’a été remporté que par de farouches amazones. La voile et la course automobile sont également des sports mixtes bien que la présence de femmes y soit encore très faible. Toutefois, être en minorité n’exclue pas la compétitivité de certaines, on peut citer entre autres Danica Patrick, qui tient tête aux meilleurs dans les courses de Nascar. Moins connus, le kinball, tchoukball et le korfbal sont également des sports qui acceptent les deux sexes.

Dans les compétitions sportives non mixtes dominées par les hommes, la position de la femme est bancale. Certains diront que la non-mixité permet de voir des femmes jusqu’aux finales mais cela renforce le fait qu’elles ne sont pas du même niveau que leurs équivalents masculins. Cette situation pousse les gens à penser que les femmes ne peuvent affronter les hommes de façon équitable. Cette idée d’infériorité naturelle du sexe féminin est un préjugé sexiste issu d’une construction sociale et culturelle fausse. Cela n’a rien à voir avec la biologie mais au fait que la proportion d’hommes engagés dans le sport et les compétitions est nettement supérieur à celui des femmes. Ainsi, plus il y a de personnes engagées dans un sport, plus le niveau de celui-ci est élevé. Si les compétitions devenaient mixtes, les femmes affronteraient probablement des hommes plus forts qu’elles. Mais qu’importe ? Les épreuves de courses comme le sprint sont dominées par des athlètes noirs, est-ce une raison de séparer les athlètes en fonction de leur couleur de peau ? Dans la plupart des compétitions, les jeunes dominent sur leurs aînés, pourtant les compétitions ne sont pas catégorisées par tranche d’âge. Les hommes et les femmes quoique différents ne doivent pas être inégaux.

Le premier facteur de cette inégalité est l’éducation et le choix des activités sportives dès le plus jeune âge. Souvent, les parents ne présenteront pas le football et la gymnastique au même niveau en fonction du sexe de leur enfant. On va donc associer les sports nécessitant force physique et endurance aux hommes tandis que les sports privilégiant la souplesse et l’élégance seront associés aux femmes. Résultat, la danse et la gymnastique compte une grande majorité de femmes alors que le football et le rugby recensent moins de 5% de licenciées. De plus, dans les sports où les hommes sont majoritairement présents, une femme va essuyer de nombreuses moqueries issues de préjugés sexistes. Elle sera forcément masculine et virile même si elle porte des jupes et des talons. Il s’agit là de réduire l’aspect féminin à la seule apparence physique. Ces constantes insultes n’encouragent donc pas les femmes à pratiquer ces activités sportives.

Le manque de visibilité médiatique des compétitions féminines dans les sports à forte population masculine est également un frein à la motivation des femmes pour se lancer. En outre, les sports “peu féminins”, considérés comme peu rentables, sont très peu médiatisés. En revanche, les médias vont favoriser les sports “attractifs” au prix d’une sexualisation de la femme : mini-jupe, tenue moulante… Une sorte de prix à payer pour leur médiatisation. Toutes ces discriminations proviennent de notre société. L’histoire du sport a été construite par et pour les hommes. Le sport a été pensé pour montrer la virilité et la force des hommes. Bien que les femmes soient également performantes, la pensée d’une infériorité naturelle est ancrée dans les esprits. C’est cela qui forme un gouffre entre la pratique de loisirs et la pratique à haut niveau. Les femmes ne sont pas encouragées à viser plus haut. Par exemple, bien que l’équitation soit pratiquée à 80% par des femmes, on a tendance à voir plus de cavaliers à haut niveau que de cavalières (le dressage demeure une exception cependant).

Pour contrer cette invisibilité médiatique et ces inégalités, des mouvements se créent. Les campagnes des “24h du sport féminin” et “Pas de filles hors jeu” sont des signes d’avancée. L’engagement des hommes dans ces promotions est important car l’égalité ne se fera pas sans eux. Le mouvement HeForShe promeut cet engagement et invite les hommes à s’investir. Cependant, cela n’est pas encore suffisant, l’égalité doit être enseignée dès le départ. Encore aujourd’hui on voit trop peu de femmes dans les postes à responsabilité et dans les instances dirigeantes. Il faut apprendre l’égalité aux enfants et leur faire pratiquer le même sport ensemble. Il s’agit également de s’engager pour l’égalité des sexes en général et non plus uniquement dans le sport.

Il est intéressant de remarquer que l’avancée pour l’égalité des genres n’est pas égale dans tous les pays. L’Irlande et la Suède sont différents en termes de loi pour les femmes. Le pays suédois est connu pour être meilleur pour la gente féminine tandis que l’Irlande interdit encore sévèrement l’interruption volontaire de grossesse. En effet, les femmes sont présentes parmi les membres du gouvernement suédois : 44% d’élues parlementaires et 38% de secrétaires d’État. Également, la mère et le père peuvent se partager le temps de congé parental comme ils le souhaitent. Malheureusement, d’un autre côté les irlandaises voulant avorter sont encore des criminelles. En Irlande il n’est possible d’avorter que si la mère est en danger de mort et encore, le droit de vie du fœtus prime sur le droit de vie de la mère. De plus, dans la plupart des écoles irlandaises le port de la jupe est imposé dans le code vestimentaire.

Le chemin est donc encore long pour atteindre l’égalité entre les hommes et les femmes. Le sport est un domaine dans lequel il y a du travail à faire pour cette égalité. La notion  d’égalité doit être acquise dès le plus jeune âge et ce, pour n’importe quel domaine. Le monde sportif n’est ainsi qu’un reflet des idées de notre société et de ses inégalités. La Suède est un bon exemple, le football y est le sport national tant pour les femmes que pour les hommes et le football féminin a bien une place reconnue. Il est donc important que l’égalité des droits progresse dans les pays afin d’envisager l’égalité dans le sport. Des initiatives se mettent en place et on peut voir de plus en plus de mobilisation, il ne reste plus qu’à attendre pour voir ce qui va changer dans le monde du sport dans les prochaines années.