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"Archipels" est le fruit du travail des équipes de ces deux revues :

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Archipels | Être libre sur le plateau
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Être libre sur le plateau

 

Si le cadre est volontairement oppressif, nous nous alignons pour tout : toucher les 7,40 euros d’argent de poche ; avoir son repas ; faire la lessive ; prendre une douche ; aller aux toilettes ; retirer son courrier… Nous sommes comme assignés à résidence, interdits de ne pas être absents du centre pendant plus de 3 jours sous peine d’expulsion. Une prison pour de nombreux résidents qui ne demandent qu’à s’épanouir professionnellement, certains ayant fait des études universitaires, occupé des postes à responsabilités dans leur pays. Dans le renoncement, beaucoup choisissent de se languir dans leur chambre où certains attendent depuis plus d’un an la réponse des autorités. D’autres ayant perdu espoir, tentent désespérément de trouver un plan B. Au bloc A, on constate plusieurs cas de grossesse, les commentaires vont bon train sur leurs auteurs, généralement des non-résidents jouissant de titres de séjour régulier.

 

La vie suit son cours malgré tout, ponctuée par des arrivées de migrants dont le nombre a presque doublé. Pas un seul lit n’est libre dans les chambres bondées. La rumeur laisse entendre que la Croix Rouge envisage de transformer le gymnase en dortoir, tant les réfugiés affluent. Ils sont de toutes nationalités, de toutes confessions religieuses et de toutes langues. Le sentiment de culpabilité d’avoir quitté sa terre natale est aussi fort que le ressentiment du voisinage du centre, qui nous assimile à des voyous, à des bandits. Il faut faire la plonge, le nettoyage, le désherbage, ou les travaux de maçonnerie, de menuiserie, d’électricité payés entre 10 et 48 euros la semaine pour gagner un peu plus d’argent.

 

 

Ostracisme

Tant qu’il n’est pas reconnu comme « réfugié » par les autorités compétentes, l’exilé est invisible en tant qu’individu, socialement entre parenthèses. Il n’a pas accès au marché du travail. Il n’est nulle part, ni dans un espace temporel commun, ni dans un espace géographique reconnu. Nous avons perdu nos repères familiaux, notre langue maternelle, notre pays natal. Malgré le temps qui passe, il n’y a toujours pas de rencontre avec notre pays d’accueil. Forts de ces constats, un après-midi d’automne 2013, un groupe de comédiens issus du Conservatoire royal de Liège et du Théâtre national de Bretagne, indignés par l’arbitraire et l’ostracisme en matière d’immigration en Europe, frappe aux portes de notre centre. Quelques jours avant leur arrivée, des affiches ont été collées. Une liste a été ouverte au « bureau », mais ce n’est pas la grande affluence. En vérité, du théâtre, nous connaissons très peu de choses ou rien du tout, à part quelques œuvres classiques étudiées dans des programmes scolaires hérités de la colonisation française telles que Le bourgeois gentilhomme de Molière, Les fables de La Fontaine…

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